Chronique des Mondes Emergents

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Ce siècle est à la barre et je suis son témoin. Victor Hugo [L'Année terrible (1872)]

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    Les indignés : écart ou sur-place ? Désobéissance, résistance et insubordination 3/3

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    Messages : 123
    Date d'inscription : 12/05/2014

    Les indignés : écart ou sur-place ? Désobéissance, résistance et insubordination 3/3 Empty Les indignés : écart ou sur-place ? Désobéissance, résistance et insubordination 3/3

    Message par Admin Mar 10 Juin - 19:47

    #résistance #indignation #indigné #indignados #Hessel #puissancecoloniale #Gandhi #nonviolence #terrorisme #société #contestation #manif #manifestation #Vichy #désobéisseur #fonctionnaire #éducationnationale #droitderéserve #démocratie #2011 #HannahArendt #15M #Espagne #capitalisme #Plantones #Oaxaca

    Temps critiques, 12 juillet 2011
    Première partie du dossier: https://chroniquemondesemerg.forumgratuit.be/t59-les-indignes-ecart-ou-sur-place-desobeissance-resistance-et-insubordination-1-3
    Seconde partie du dossier: https://chroniquemondesemerg.forumgratuit.be/t60-les-indignes-ecart-ou-sur-place-desobeissance-resistance-et-insubordination-2-3#60


    Les indignés : écart ou sur-place ? Désobéissance, résistance et insubordination 3/3 Stepha10
    (Crédit photo: culturebox.francetvinfo.fr. Stéphane Hessel, auteur de "Indignez-vous")

    1 On oublie trop facilement que la résistance à la puissance coloniale anglaise aux Indes ne consista pas uniquement en actes de désobéissance pacifiques de la part de Gandhi et de ses disciples, mais fut accompagnée d’actes terroristes.
    2 Le retour à la mode d’un théoricien du droit et de l’État comme Carl Schmitt nous fournit un bon exemple de la prolifération actuelle de situations d’exception (la juridiction de l’Italie des « années de plomb », Guantánamo et les lois contre le terrorisme, gardes à vue abusives sous prétexte sécuritaire).
    3 Cf. l’exemple des fonctionnaires qui démissionnèrent pendant le gouvernement de Vichy. La défaite militaire ne justifiait pas la collaboration active.
    4 On en a un exemple avec le projet de lettre à Sarkozy et au gouvernement décidé à l’université d’été des désobéisseurs à Lyon. Plusieurs des projets de lettres incluent l’idée d’insoumission aux ordres… mais dans la « loyauté » au système, c’est-à-dire à l’institution Éducation Nationale. C’est la quadrature du cercle. Un fonctionnaire « loyal », c’est un fonctionnaire qui dit qu’il n’est pas d’accord, mais qui applique ce avec quoi il n’est pas d’accord. Ceci vient d’être officialisé par l’administration centrale qui en appelle maintenant de plus en plus souvent à un « devoir de réserve » des fonctionnaires alors que ce devoir n’existe que pour les membres de la haute fonction publique et non pas pour les fonctionnaires de base.
    5 Alain Refalo distingue les « désobéisseurs » publics et les « désobéissants » discrets (op. cit., p. 54).
    6 Cf. J.-M. Muller dans sa lettre à l’inspecteur d’académie de la Haute-Garonne suite à la sanction prise contre Alain Refalo : « Un fonctionnaire doit être un homme avant d’être un sujet. Et un homme responsable obéit aux exigences de sa conscience plutôt que de se soumettre aux injonctions de l’État (un fonctionnaire ça obéit ou ça démissionne) ». Toutefois c’est pour réinscrire la désobéissance dans une « forme supérieure de civisme » ce qui revient à chercher à tout prix une légitimité… dont on n’est pas très sûr puisque c’est en principe l’État démocratique qui définit le civisme en vigueur. On n’est pas loin de se mordre la queue !
    7 Les enseignants désobéisseurs comme d’ailleurs les collectifs École en danger ont bien pointé, entre 2008 et 2010, les insuffisances des grèves et manifestations sans lendemain car le retour au travail est alors toujours le retour à l’ordre des choses comme si chacun se dissociait, un jour manifestant criant son indignation, le lendemain salarié docile ou respectueux.
    8 Ni sud ni la cnt n’ont appelé leurs adhérents à la désobéissance publique.
    9 Nous reviendront sur cette question dans le no 16 de Temps critiques, à paraître à l’automne 2011.
    10 Dernier exemple d’actualité, l’appel pour une manifestation anti-raciste et surtout anti-Sarkoziste du 4 septembre 2010. L’appel à cette manifestation essaie de nous faire accroire que les politiques actuelles seraient en contradiction avec les principes de la République, mais de quelle république, quand on sait que la troisième République, celle de Jules Ferry s’est construite sur les milliers de morts et de déportés de la Commune, la quatrième sur une politique colonialiste partagée par tous les partis politiques de droite comme de gauche et une cinquième République qui en a remis une couche avec Papon à Charonne.
    11C’est ce que ne semble pas percevoir Alain Refalo dans la conclusion de son livre.
    12 Comme le dit Annie Le Brun dans un entretien au Magazine littéraire, il paraît insupportable qu’à tout propos on parle de « Résistance », en se référant implicitement ou non à l’époque de la Seconde Guerre mondiale. C’est encore une de ces approximations, au bout du compte monstrueuses, qui en dit long sur l’air du temps.
    13 Il mélange d’ailleurs tout quand il fait des partis et des syndicats des organisations de résistance ! Mais de résistance à quoi ? Les partis comme les syndicats sont financés par l’État et le patronat, comme d’ailleurs les associations. Tout juste peut-on alors parler de défense des acquis ou de certains principes comme celui de la mission de service public, mais en aucun cas de résistance.
    14 Pour Hobbes, par exemple, dans une conception de l’État moderne qui deviendra le modèle du libéralisme politique.
    15 Dans le même temps, mais en sous-main, le pouvoir négociait avec les « terroristes » canaques et corses.
    16 Un petit nombre ont rejoint directement les rangs de l’aln, d’autres ont poursuivi leur combat en Suisse ou en Belgique avec les réseaux d’aide au fln, les réseaux communistes antistaliniens (notamment trotskistes) ou encore les associations humanitaires ou les mouvements pacifistes. La manifestation politique la plus remarquable de ces insoumis est celle du réseau « Jeune Résistance ». Ce réseau associe des clandestins et des militants qui les soutiennent. Cf. Cette thèse récente dirigée par Benjamin Stora sur les désobéisseurs militaires et civils (www.ldh-toulon.net/spip.php ?article2265).
    17 L’émergence du psu a d’ailleurs été favorisée par l’action de ces réseaux. Cette résistance sous forme d’insoumission et de désertion a souvent été occultée de l’histoire de l’extrême gauche comme de celle du communisme radical dans la mesure où elle n’est pas politiquement correcte : trop tiers-mondiste pour les uns, trop exclusivement anti-impérialiste pour les autres, trop frontiste pour les derniers.
    18 Alain Refalo (op. cit.) parle de « l’intérêt public », mais ça ne résout pas le problème.
    19 Hannah Arendt, Du mensonge à la violence, éd. Calmann-Lévy, 1972, p. 58.
    20 Cf. l’occupation de la place Bellecour à Lyon pendant le mouvement contre la réforme des retraites d’octobre-novembre 2010. Cf. notre texte : « Sur les luttes d’octobre-novembre 2010 » disponible en ligne sur le site de Temps critiques : tempscritiques.free.fr/spip.php ?article280
    21 Pour des précisions sur cette question et la particularité de la critique de Negt par rapport à Habermas, on peut se reporter au blog des « Journées critiques » (journcritiques.canalblog.com) et tout particulièrement à l’article d’Alexander Neumann.
    22 Au cours de la grande manifestation du 15 juin, on a vu la grande masse des manifestants réoccuper la place Syntagma en repoussant pacifiquement les forces de police alors que celles-ci avaient été harcelées toute la journée par des bachalis (littéralement : les « casse-tout ») eux-mêmes tenus à l’écart de la grande manifestation par ses organisateurs. Cette différenciation semble avoir été moins nette au cours des dernières manifestations fin juin dans la mesure où la répression s’est fait plus active et l’exaspération plus grande.
    En Espagne, suite à une manifestation à Barcelone, à l’initiative du « 15M » le 15 juin où des politiciens locaux furent houspillés, les médias passèrent en boucle des scènes d’accrochage censées démontrer la violence des indignados. Depuis, les porte-parole du mouvement cherchent à donner des preuves du caractère pacifique des rassemblements et demandent à leurs participants d’exprimer visiblement cette position (par des affichettes au format A5 par exemple).
    23 Toutefois, un peu tardivement, une commission « Convergence des luttes » animée par une tendance révolutionnaire au sein du npa, proposera des actions en direction de salariés grévistes de la région parisienne. Malgré un accueil empathique en ag, ces actions resteront très symboliques et périphériques.
    L’opposition éthique des indignados peut-elle rencontrer la colère sporadique de travailleurs desperados ? Là encore, rien n’est écrit et ce n’est pas une analyse en termes stricts de classe qui résoudra le problème.
    24 On retrouve cette perspective au sein de certaines tendances dites insurrectionnistes. Pour plus de développement sur ce point, on pourra se reporter au livre, en préparation, de J. Wajnsztejn et G. Zavier L’insurrectionnalisme : nostalgie de l’insurrection ou nécessité de notre temps.
    25C’est ce que l’on peut reprocher à des textes comme celui de Miquel Amorós « Réflexions intempestives après les tambourinades » (14/06/11) où on retrouve le ton péremptoire de celui qui condamne à mort un malade en en ayant seulement pris la température et celui signé Nacho Mato : « Ils appellent ça la révolution mais ce n’en est pas une » (20/06/11). Néanmoins, ce dernier qui s’exerce à distinguer révolution politique et révolution sociale comprend une citation intéressante sur la révolution politique espagnole de 1869 : « Curieux destin de cette révolution qui depuis ses débuts, semble avoir seulement des ennemis à sa gauche » (Josep Fontana, Cambio económico y actitudes políticas en la España del siglo xix, Barcelona, Editorial Ariel, p. 131). Une citation qui, de Tunisie en Espagne en passant par la Grèce et l’Égypte, n’a pas perdu de son actualité.
    C’est déjà ce qui était incohérent et confusionniste chez les anars insurrectionnalistes mexicains qui refusaient de se mélanger à l’Assemblée Populaire des peuples d’Oaxaca (appo), née de l’insurrection populaire de 2006, alors que cette assemblée appelait clairement à boycotter les élections et se débattait au milieu de toutes les difficultés qui sont inhérentes à l’impossible instauration d’une démocratie déterritorialisée, urbaine, consensualiste, principalement discursive, imprégnée d’égalitarisme citoyenniste (tout le monde a le droit à la parole et à la représentation dans l’assemblée) mélangeant des imaginaires et des habitudes de pensée divers et souvent opposés.
    26 Cf. sur ce point le texte de Peter Gelderloos « Spanish Revolution at the crossroads » tiré de la newsletter américaine Couterpunch, disponible surwww.couterpunch.org/gelderloos06072011.html. Ce texte a été traduit en français par une camarade du « réseaudediscussion » et nous pouvons le transmettre en fichier sur demande.
    27 Les anciennes médiations perdurent, mais affaiblies, elles opèrent surtout en dehors de leur fonction d’origine. Les syndicats participent à la gestion du social, la police et la justice s’autonomisent de la politique comme on a pu le voir le plus aisément en Italie, pays où les politiques s’autonomisent de la sphère politique étatique par leurs pratiques clientélistes, mafieuses, oligarchiques.
    Pour un développement critique sur les tentatives de création de communautés politiques autonomes, on peut se reporter à l’article de J. Guigou, « Les nostalgiques de la cité grecque », Temps critiques no 15, p. 186-190, également disponible ici :tempscritiques.free.fr/spip.php ?article211
    28 Cf. l’article « Quelques précisions sur capitalisme, capital et société capitalisée »,Temps critiques no 15, p. 5-65, disponible sur le site de la revuetempscritiques.free.fr/spip.php ?article206
    29 Par exemple la qualité « d’intermittent du spectacle » recouvre des conditions de travail et de vie très dissemblables.
    30 Sur les pratiques de l’écart, cf. notre texte bilan sur les grèves d’octobre-novembre 2010, disponible sur le site de la revue Temps critiques ici : tempscritiques.free.fr/spip.php ?article280
    31 Ibid. tempscritiques.free.fr/spip.php ?article280
    32Cf. www.youtube.com/watch ?v=FOjtOvYQ2qk&feature=channel_video_title. On en a un autre exemple avec la victoire d’une action anti-desahucios (expulsions) dans le quartier ouvrier de Ciudad Lineal à Madrid. Il semblerait que de nombreuses actions de quartier couvrent la défense de personnes menacées par leurs prêts hypothécaires non recouvrables, au sein d’une « Plate-forme des victimes des hypothèques » (pah).
    33 Plantones est le nom que les insurgés d’Oaxaca (Mexique) ont donné aux campements sauvages qui leur ont servi à occuper le centre de la ville lors du soulèvement de 2006.
    34 Comme nous le disions dans le no 10 de la revue (« Politique élémentaire » de Loïc Debray, p. 20, 1998) : « Il est urgent de remettre en selle la radicalité qui consiste à tenir bon y compris sur l’impossible, et même si on est seul, en se disant « Si je ne le fais pas, personne ne le fera » et à chaque fois forcer la solidarité pour convertir la peur en enthousiasme. Et cela, à l’endroit où on est, ce qui est déjà beaucoup ». Le récent exemple tunisien, comme l’action des enseignants désobéisseurs en France, montrent que cette radicalité n’est pas l’apanage d’une avant-garde, mais la possibilité de tout un chacun. Là encore, il faut que se créent les conditions d’une conjonction entre la résistance comme action première par rapport au pouvoir et la résistance comme réponse ou réaction au pouvoir.
    35 En référence à un album posthume de Joe Strummer ex-membre du groupe The Clash.

      La date/heure actuelle est Dim 19 Mai - 15:13